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Intégration de l'IA Générative à EDF

 

IA Générative à EDF : Avantage ou Menace pour les salariés

Il y a un an, les représentants du CSE Central d'EDF SA a découvert l'intégration de l'outil Copilot dans l'Entreprise via un article publié sur Vivre EDF OnLine. Garant de la bonne marche générale de l'Entreprise, le Comité a immédiatement pris en main cette question. Une Commission a d’abord été créée pour analyser les impacts de l'introduction de l'Intelligence Artificielle générative sur les conditions de travail, l'emploi et les compétences. Le cabinet Twisting a ensuite été missionné pour effectuer une expertise approfondie dont les résultats, présentés en séance, sont désormais accessibles.


Contexte

Lors de la séance du 22 mai 2024, les élus du CSE Central ont découvert que la Direction avait constitué, dès le printemps 2023, un groupe de travail incluant des membres de la DSIG, de la DSIT, ainsi que des représentants de toutes les directions de l’Entreprise EDF SA et de diverses filiales telles que Dalkia, Enedis ou encore Framatome, sans en informer le Comité.

Ensemble, ils ont œuvré à l’identification des cas d’usages possibles et potentiellement porteurs de valeur dans les différents métiers. Selon la Direction, cette initiative représente une opportunité pour soutenir les salariés de l’Entreprise au quotidien. En effet, Copilot est un outil capable de résumer des textes longs non confidentiels, de rédiger des articles, des mails ou des discours. Il permet également de développer ou de corriger du code informatique, ainsi que de générer ou d’analyser des images.

En ce qui concerne les risques, la Direction s’est limitée à évoquer ceux liés aux données et ceux inhérents aux outils d’intelligence artificielle. Quid des impacts sur les salariés et leurs conditions de travail ? Aucune information. Mais l’outil est mis à leur disposition depuis le mois d’avril 2024.


Qu'est-ce que l'IA Générative ?

L’IA générative, ou Intelligence Artificielle générative, est une branche de l’intelligence artificielle qui « génère du contenu » à partir de données existantes. Il peut être question de texte, de sons, d’images, etc. qu’on lui a donné à analyser, et elle en génère de nouveaux. Elle utilise des modèles d'apprentissage profond pour simuler les processus d'apprentissage du cerveau humain. Ces modèles analysent de grandes quantités de données pour identifier des schémas et des relations, puis utilisent ces informations pour répondre aux requêtes des utilisateurs en générant du contenu pertinent.


Que dit le Rapport d'Expertise du CSE CENTRAL ?

Le Groupe EDF a décidé d'intégrer une IA générative dans l'Entreprise et de la mettre à disposition de ses salariés. Elle est présentée comme un outil d'assistance plutôt qu'un remplacement des compétences existantes. Les directions métiers semblent y voir principalement une opportunité de montée en compétence des équipes et de réduction de la dépendance à l'expertise externe. 

Cependant, la révolution des IA génératives n'a pas encore touché les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME). Selon une enquête, seuls 3 % des dirigeants de TPE/PME utilisent régulièrement cette technologie, tandis que 13 % en font un usage occasionnel. Les freins à l'adoption par les entreprises françaises sont en partie dus aux limites actuelles de cette technologie, qui présentent également des risques : consommation énergétique élevée, empreinte carbone importante, coûts élevés, sécurisation insuffisante, risques d’« hallucinations » et amplification des biais, ce qui pourrait être problématique dans le cadre de la réglementation de l'IA Act*.


Quels impacts réels liés à l’utilisation de l’IA générative ?

Sur les salariés et leurs conditions de travail… L’introduction de l’IA générative dans le monde du travail suscite des inquiétudes quant à son impact sur les inégalités entre les salariés. Les métiers les plus exposés à l’automatisation sont souvent occupés par des travailleurs moins qualifiés, ce qui pourrait accentuer les disparités existantes. De plus, la société étant structurée autour de la lutte entre les propriétaires des moyens de production et les travailleurs, l’IA générative pourrait renforcer cette division en concentrant davantage le contrôle entre les mains des propriétaires. Cela réduirait la part des salariés dans la prise de décision et limiterait leur expression concernant l’utilisation de l’IA, la perte de contrôle de leurs outils de travail, l’automatisation des tâches et leur autonomie. Ce qui pourrait avoir des conséquences sociales, et sur la santé mentale et physique des travailleurs, qui peuvent devenir des opérateurs passifs, exécutant des tâches sous la supervision d’algorithmes visant à maximiser l’efficacité productive. 

L’IA peut également être utilisée pour surveiller les performances des employés de manière plus intensive, entraînant une pression accrue pour augmenter la productivité et générant du stress. L’automatisation peut réduire les interactions humaines et la satisfaction au travail. Enfin, les transformations récentes des espaces de travail en open-space, avec des postes de travail non attribués, ont déjà généré un manque d’épanouissement chez certains salariés…


Quels impacts sur les emplois et les métiers ?

Pour le moment, il n’y a pas beaucoup d’études sur les impacts sur le travail salarié lié à l’utilisation de l’IA générative car son déploiement reste encore faible en France. En revanche, l’IA générative permet d’automatiser certaines tâches ce qui peut entraîner la suppression de certains emplois. C’est le cas chez Google qui a annoncé depuis 2023, une série de licenciements touchant plusieurs centaines d’employés (environ 6 % de ses effectifs soit 122 000 salariés), principalement dans ses divisions dédiées à la vente de publicités, à Google Assistant, ainsi qu’à la réalité augmentée et au hardware.

L’essor de l’IA générative a conduit Google à réorienter leurs investissements technologiques, donc les compétences internes, mais aussi à réduire des postes là où les outils d’IA génératives permettent désormais d’automatiser une partie significative des processus de travail (développeur, communication, service client notamment). Concernant les métiers, beaucoup risquent d’être transformés ce qui nécessitera de nouvelles compétences et exigera une adaptation des salariés, ce qui peut être difficile pour certains. Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), 27 % des professions seront profondément changées par l’utilisation massive de l’Intelligence Artificielle générative. Cette transformation classique liée au changement des outils de travail risque, si elle n’est pas accompagnée, de créer des ruptures brutales et massives en termes d’emplois et d’employabilité.


L'Avis du CSE CENTRAL

L’introduction de l’IA générative à EDF promet des gains de productivité en automatisant par exemple des tâches répétitives et chronophages, ce qui pourrait réduire les coûts opérationnels. Elle permet également la création de nouveaux services, stimulant ainsi l’innovation au sein de l’Entreprise. Mais elle cache des conflits entre les intérêts des employeurs et des salariés, et pourrait même renforcer la division entre les propriétaires des moyens de productions et les travailleurs en concentrant le contrôle entre les mains des employeurs et en limitant l’expression et l’autonomie des travailleurs. C’est une nécessité de protéger les emplois contre les risques de remplacement par l’automatisation en soulignant l’importance de la formation continue et des opportunités de reconversion professionnelle pour les salariés, afin qu’ils puissent s’adapter aux nouvelles technologies et préserver leur employabilité. Ces nouveaux risques seront à intégrer dans le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP).

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